Dès le mois d’octobre une étrange fièvre se propage dans la communauté des chasseurs du Sud-Ouest : c’est le temps de la chasse à la palombe, ce ramier proche du pigeon qui migre alors par voliers vers la péninsule ibérique, pour fuir le froid de l’hiver.
J’ai souvenir dans mon enfance, d’un ami de mes grands-parents qui chaque année attendait dans le Gers ce moment en bichonnant ses appeaux, ces pigeons appelants qui servent à attirer les précieux volatiles.
Chaque année il posait une semaine de congés pour se consacrer à sa passion et nous régalait ensuite de ses récits de chasse et de quelques-uns de ses trophées. Ma grand-mère les préparait alors en salmis, une recette traditionnelle du sud ouest.
Je n’ai pas de chasseur à la palombe dans mon entourage familial, mais par contre l’un de mes collègues de travail a bien voulu lever un peu le voile sur cette chasse traditionnelle et nous en dire plus sur le fonctionnement d’une palombière et le déroulement d’une journée de chasse :
Salmis de palombes aux cèpes (cliquez sur la photo pour la recette)
1 –Vincent, peux-tu stp nous expliquer sur quelle période se pratique la chasse à la palombe ?
La chasse en palombière se déroule à l'automne quand les palombes migrent des pays nordiques vers la péninsule Ibérique.
Généralement, cela commence début octobre jusqu’à mi-novembre.
2 – La chasse à la palombe est une tradition du Sud-Ouest, en quoi est-elle plus typique que la chasse au canard que l’on connaît par ailleurs ?
La chasse en palombière est effectivement vraiment ancrée dans le Sud-Ouest, avec un mode de chasse et des installations typiques.
La chasse au canard est quant à elle plus universelle, et exercée dans de nombreuses régions de France.
3 – A quand remonte cette tradition par chez nous ?
On trouve des écrits sur la chasse à la palombe dans le Sud-Ouest remontant au XIII ème siècle.
Cette tradition n’a cessé de s’ancrer et de se développer depuis, se transmettant de générations en générations.
4 – Pigeon, tourterelle ? Les non-initiés ne font pas la différence, peux-tu nous expliquer en quoi se différencie une palombe ? Que réponds-tu aux personnes qui décrient cette chasse ?
Ce sont 2 oiseaux assez différents, la palombe s’apparentant beaucoup plus à un pigeon qu’à une tourterelle.
La palombe (à gauche de la photo) se distingue à sa collerette blanche ainsi qu’à son plumage bleuté avec une bande blanche sur les ailes.
La tourterelle (à droite) a un plumage gris beige rosé, avec un demi-anneau noir sur son cou.
Les détracteurs de cette chasse traditionnelle en ont souvent une vision erronée, et pensent que l’espèce est en danger compte-tenu des prélèvements d’oiseaux réalisés chaque année.
Or, les nombreux recensements effectués (comptages divers, notamment au passage des Pyrénées) montrent une stabilité de l’espèce, avec plus de 2.5 millions de palombes franchissant les Pyrénées chaque année. Sans compter les palombes de plus en plus nombreuses se sédentarisant dans notre région compte-tenu des hivers de moins en moins rigoureux.
5 - Mais que fait-on dans une palombière, peux-tu nous la décrire et expliquer son fonctionnement ?
La palombière se compose la plupart du temps d’un poste d’observation installé dans un arbre (chêne le plus souvent) permettant de guetter l’arrivée d’un vol et d’actionner les appeaux pour tenter de le faire poser.
Lorsque le vol est posé, les chasseurs descendent au sol et se rendent à proximité des arbres sur lesquels se sont posées les palombes par un réseau de couloirs camouflés construits dans le sous-bois.
Dans certaines palombières, les chasseurs tirent les palombes posées dans les arbres au fusil, mais l’art le plus noble consiste à capturer les palombes au filet en les incitant à se poser au sol sur des zones aménagées et sur lesquelles sont disposés les filets.
6 – A quoi servent les appeaux ? Comment procède-t-on pour attirer et faire se poser les palombes ?
Les appeaux (ou appelants) servent à attirer les vols de palombes de passage pour les faire poser sur les arbres de la palombière. Le but est donc d'imiter avec ces appeaux, qui sont des pigeons domestiques ou des palombes, des oiseaux en train de se poser, de se restaurer (glaner) ou de se reposer dans le bois.
Pour cela, les chasseurs confectionnent le système suivant : l’appeau est attaché par les pattes sur un mécanisme en forme de raquette et placé en hauteur dans les arbres. En actionnant le mécanisme, il déséquilibre l’oiseau qui bat des ailes et imite alors une palombe en train de se poser.
7 – Depuis combien de temps chasse-tu la palombe ? C’est une tradition familiale ou pas ?
J’ai accompagné mon père à la chasse à la palombe dès mon enfance (8 à 10 ans).
Dans la grande majorité des cas, il s’agit d’une tradition familiale regroupant 2 ou 3 générations et se transmettant de père en fils.
8 – Maintenant, la question qui fâche ^^ : alors, la Chasse à la palombe : un passe-temps typiquement masculin ? y a-t-il des femmes qui pratiquent cette chasse ? Cantonnées à la popote ou vraies participantes ?
Comme dans tous les autres types de chasse, les femmes pratiquant la chasse à la palombe sont minoritaires.
Mais il existe de vraies passionnées de ce type de chasse.
Même si les palombières ont la réputation d’être réservées à la gent masculine, les femmes y sont généralement les bienvenues, et pas uniquement pour préparer la popote bien sûr !!!
9 – Déroulement d’une journée type ?
La journée type en palombière commence de très bonne heure, avant le lever du jour avec l’installation des appeaux souvent à la frontale.
Puis un bon café est apprécié avant de monter au poste d’observation.
La matinée est généralement entrecoupée d’un casse-croûte sauf lors de gros passages où les chasseurs restent en alerte permanente.
Le repas du midi est le moment de partage et de convivialité sacré : apéro, dégustation de mets souvent à base de gibier, le tout arrosé d’un bon cru (à consommer avec modération bien entendu ).
Puis le guet reprend jusqu’à 17 h environ.
Les appeaux sont ensuite descendus des arbres, nourris, et placés dans leur cage jusqu’au lendemain.
La journée de chasse peut ainsi s’achever.
10 – Gastronomie : on connaît assez bien le salmis de palombe, mais as-tu une recette fétiche à nous dévoiler ?
En dehors du salmis traditionnel, il y a une façon toute simple de déguster les jeunes palombes (plus tendres que leurs aînées, reconnaissables à leur plumage) :
Les palombes sont rôties au barbecue, salées, poivrées et arrosées de lard fondu à l’aide d’un outil en fonte traditionnel appelé capucin.
Servies saignantes et agrémentées de quelques cèpes par exemple, c’est juste un régal !!!
Je veux bien te croire !
Vincent, un grand merci pour avoir bien voulu répondre à mes questions !
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